28 mai 2007

mauvais rêves (bad dreams)




Prise le 29 mars à 9H30

Une image qui me trouble étrangement, dans sa banalité. Un peu comme l'on s'éveille en pleine nuit avec un sentiment de malaise, sans parvenir à se souvenir du rêve qui l'a provoqué. Peut être à cause de cette lumière plate de temps pluvieux; peut être à cause de son déséquilibre; mais plus certainement parce qu'elle m'apparait représenter un tout autre endroit que celui où elle est censée avoir été prise.

17 commentaires:

Anonyme a dit…

Est-ce parce que la maison évoque un peu la House by the railroad d'Edward Hopper, celle dont Hitchcock s'inspira pour Psychose ?
En tout cas, je ne peux passer sur ce double viaduc sans penser à ce type qui, s'y étant trouvé en panne une nuit, a essayé de traverser les voies : son pied n'ayant rencontré que le vide entre les deux chaussées, l'homme s'est écrasé 50 mètres plus bas.

Anonyme a dit…

Croyez-moi Monsieur Maxime, aujourd'hui en ce 27 mai, il y avait la même luminosité chez moi, pluie, brouillard et neige... irréel.

Anonyme a dit…

Par l'atmosphère et le contraste entre la maison à l'apparence ancienne et les arbres d'un côté, le viaduc et les semi-remorques de l'autre, cela me rappelle les films du japonais Miyazaki.

En tout cas, pour moi qui passe souvent sur le viaduc en voiture, c'est intéressant de le découvrir sous cet angle.

Maxime a dit…

Christian : le jour où l'homme est tombé, il y avait un brouillard à couper au couteau. Sans doute ignorait-il même qu'il se trouvait sur un viaduc.
Sur le coup, peut-être a-t-il cru qu'il s'agissait d'une marche. Puis d'un talus. Ensuite... Combien de temps faut-il pour tomber de 56 mètres ?
Voici donc l'association qui me manquait. Merci, Dr Jung !

Delphinium : Ici de même, mais aujourd'hui je ne suis pas sorti. Peut-être ais-je loupé quelque chose ?

Manu : Miyasaki, c'est très juste : la curieuse maison, les deux arbres et les ponts dans le ciel. Mais pour le mauvais rêve, je crois que c'est Christian qui en a réveillé le souvenir : un rêve où l'on tombe éternellement.

Anonyme a dit…

cette photo es étonnante par son côté "monde à l'envers" : la maison en bas les caMions en l'air, les arbres sans tête, le motel de Norman Bates, le brouillard diffus, ces arches monotones... on dirait un collage surréaliste.

Peter a dit…

C'est fou l'effet qu'un peu de brouillard peut faire à une photo! Magnifique!

C'est bizarre, mais dans le centre de Paris ou j'habite on ne voit que très rarement le brouillard. De tout façon, je serai incapable de faire une photo de cette classe!

Donc, Christian sait ou la photo a été prise. Un secret?

hpy a dit…

Nous avons eu le même temps un peu triste ici, mais le plus triste c'est qu'on a à peu près le même paysage dans le coin, avec ce vide béant entre les deux voies. C'est peut-être cet endroit-là qu'il t'aurait fallu pour te reconnaître dans la photo que tu as prise?

Algoine a dit…

Les ponts sont énormes, nous coupent de tout et sont froids

Loes & Ronald a dit…

Parallel lines fading in the fog, with nice contrasting reds...
Love this one!

Algoine a dit…

Leur étroitesse ne les rend pas rassurants, leur hauteur vertigineuse nous coupe de tout. Leur design défigure le paysage. Et puis ce ne sont pas des ponts pour piétons, mais pour des véhicules froids. C'est complètement inorganique.
Dans un tel paysage nous nous sentons complètement vulnérables. Les arbres paraissent bien pauvres comme des survivants misérables d'une ancienne forêt ravagée par l'urbanisme. La maison est froide et semble inoccupée, donc morte.
C'est cela aussi qui effraie : l'absence de vie. Pour le coup, la brume n'a plus rien de féérique. Nous somme plus dans un monde abandonné, dans les limbes...
Brrrrrrrrrrrrrr ^^

Anonyme a dit…

Vision magnifiquement cauchemardesque ! Cça me fait penser à une nouvelle de Buzzati. Bientôt, il n'y aura plus besoin de piliers. Des trains d'aéronefs enjamberont le ciel en arches de métal, hideux régiments des noirs rhinocéros du cosmos.
Bon, je vais aller manger, ça ira mieux...

Anonyme a dit…

cette photo me parait comme une illustration de la pérénnité du temps car il y a des rencontres d'époques (des ponts) des contrastes entre le modernisme éclairé du haut et le côté ombrageux des demeures à l'ancienne et puis cette envie de regarder plus haut avec ces arbres d'avant plan et ces lignes qui invitent aussi à aller vers les sommets

Nathalie H.D. a dit…

Moi j'y vois le symbole de l'absurde, ou plutot du déconnecté. Rien n'est "du pays" ici, tout vient de nulle part et va n'importe où. Le vieux viaduc planté là, tout comme le nouveau qui le surplombe. Les camions qui ne font que passer en lâchant leur lot de CO2, le "chateau" au premier plan qui ne doit rien à l'architecture traditionnelle de la vallée. C'est comme un fond de poubelle pas vidée. Pas gai.

Algoine a dit…

Une sorte de patchwork loupé ?

Chamamy a dit…

J'ai l'impression d'étouffer....
Et là haut j'ai l'impression qu'il y a un accident au dessus de nos têtes!

Anonyme a dit…

Catherine a parlé de « monde à l'envers », thème baroque par excellence.
Et j'ai finalement compris que cette photo me faisait aussi penser à une fatrasie, et particulièrement à cette Ode, d'une beauté étrange et troublante, de Théophile de Viau :
Un corbeau devant moi croasse,
Une ombre offusque mes regards,
Deux belettes et deux renards
Traversent l'endroit où je passe,
Les pieds faillent à mon cheval,
Mon laquais tombe du haut mal,
J'entends craqueter le tonnerre,
Un esprit se présente à moi,
J'ois Charon qui m'appelle à soi,
Je vois le centre de la terre.
Ce ruisseau remonte en sa source,
Un bouf gravit sur un clocher,
Le sang coule de ce rocher,
Un aspic s'accouple d'une ourse,
Sur le haut d'une vieille tour
Un serpent déchire un vautour,
Le feu brûle dedans la glace,
Le Soleil est devenu noir,
Je vois la Lune qui va choir,
Cet arbre est sorti de sa place.

Maxime a dit…

Bon, je vais commencer à l'envers, cette fois. Rapide, car je fais juste un saut à la maison avant de repartir...
Christian : Magnifique, cette Ode baroque. On croirait une invocation magique. Elle est tout à fait dans l'esprit du bouquin que je suis en train de lire en ce moment, sur invitation de Jean ( Jonathan Strange & Mr Norell de Susanna Clarke). Et les trois derniers vers semblent un Haiku !

Chamamy : Il y a fréquemment des accidents sur ce viaduc - et il y a aussi un radar automatique !

Jean : Il y a de ça : un patchwork de réalités.

Nathalie : Beaucoup d'absurde et d'incompréhensible, certainement. Plutôt Brazil que le château dans le ciel, alors ! Mais un fond de poubelle, je ne crois pas, plutôt cette vénéneuse beauté dont parle le poème de Théophile de Viau.

Joseph : Ta lecture de cette photo est intéressante, un peu en rupture avec l'ambiance générale du fil, mais également juste. Il y a aussi la rencontre entre la recherche de la vitesse : le rail, puis l'autoroute, et l'immobilisme de la vallée et de la demeure. Et au final l'impression que tout le monde y a perdu quelque chose.

Matyo : Autant de mondes fermés et qui s'ignorent : celui de l'autoroute, celui du train, celui de la demeure bourgeoise. Même la vallée est fermée d'un rideau de pluie... A tout prendre, je préfèrerais des arches dans le ciel.

Jean : Peut-être bien les limbes : ce lieu entre le paradis et l'enfer auquel l'Eglise destinait autrefois les enfant morts sans avoir été baptisés. Et il y fait bien froid.

Ronald : I waited quite a long time for the red trucks or any tuch of color to come !

Jean : Les ponts rapprochent aussi, ou du moins ils le faisaient. Mais peut-être avons nous passé un seuil, sans le voir. A contrario, l'histoire de Cergie et du rhinocéros couché en travers du pont pourrait nous le laisser penser. Je crois notre époque malade (notamment) de la recherche de l'instantanéïté. La destination a remplacé le chemin. Toute doctrine qui prétend que la fin justifie les moyens me semble éminemment suspecte...

HPY : D'habitude, j'aime le vide, mais pas de ce genre là. Plutôt le vide comme un bel à-plat de bleus ou de verts. Ici, c'est un vide où l'on tombe, pas un vide où l'on peut s'étendre en paix.

Peter : Il doit surement arriver qu'il y ait du brouillard à Paris, mais probablement pas aussi souvent qu'ici. (surtout pour qui se lève tôt).
L'endroit n'est pas secret, il se trouve entre Limoges et Brive, sur l'autoroute A20. Mais ce que l'on peut voir en trajet ressemble bien peu à ceci. Beaucoup plus "riant" en général.

Catherine : Peut-être bien un monde à l'envers. Mais alors, comment fait-on pour y vivre à l'endroit? La réponse n'est pas évidente, ni sans intérêt, car ce monde c'est le notre !

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