06 janvier 2008

L'orée du bois - Edge of the wood

loup Chabrière Guérêt



Prise le 28 aout 2007 à 16H

L'orée du bois, c'est aussi le bon endroit pour rencontrer le loup. Ma grand mère me racontait comment sa tante avait été une des dernières à voir un loup dans la région. J'imagine que c'était dans les années 1880. C'était une bête efflanquée et famélique, dernier survivant apeuré d'une meute que les battues avaient éliminée. Déjà l'homme faisait sa place, sans trop se soucier du reste ; Les troupeaux pouvaient brouter tranquilles.
Celui-ci vit en Creuse, dans la forêt de Chabrière. Pas de mouton à égorger, mais un repas de viande rouge par jour, à lieu et heure fixe. Je me demande s'il a lu les fables de La Fontaine.
Ping dédie cette photo à P'tit Loup.

The edge of the wood is rather the right place to meet the wolf. My grandmother told me that her aunt had been of the last ones to see a wolf in the country. I believe it was among the 1880th. He was a starved looking one, last frightened survivor of a pack witch the beats got rid of. Men were taken the country for themselves, without worrying for all the rest. Herds shall graze grass in peace.
This one lives in Creuse, in the woods of Chabriére. No lamb to devour, but a lunch of red meat every day, at a fixed hour and place. I wonder if he has heard of La Fontaine's fables...
Ping dedicates this picture to P'tit Loup.

24 commentaires:

bicounette87 a dit…

bonjour ici bicounette87/claude

Comme je vous l'ai dit , j'ai découvert votre blog récemment et avec plaisir , tant pour la beauté des photos que parce que j'habite dans la région (la jonchère/les billanges), et que découvrir dans la même journée un blog de Nouvelle Zélande et un blog fait à qq kms de chez soi, et ce par deux parfaits inconnus , c'est formidable , et ça laisse rêveur...

merci à vous
bonne année

J'espère que vous aurez beaucoup d'envies, et beaucoup de bons moments.
Et continuez , svp ,
monsieur, Gaillardement ,
à nous faire de si belles photos

Anonyme a dit…

Ping et P'tit Loup sont bien chanceux d'avoir un si beau copain!
J'aimerais bien chanter avec eux

Lucie a dit…

Un thêatre de verdure...

Vous avez vu le grand méchant loup carnivore les enfants ?
OUI !
Vous avez peur ?
OUI !
Appelez avec moi le p'tit loup végétarien ! p'tit loup ! p'tit loup !
p'tit loup p'tit loup !

Cergie a dit…

Fini p'tit loup, c'est trop tard, p'tit loup raconte trop de bêtises et c'est plus son jour...

Lucie a dit…

OH NON !

Anonyme a dit…

Merci Ping, mais sans façon, j'en veux pas de çui-là
Même s'il est pas flou, il est bien moins beau que toi...
....
Bon, j'y vais. C'est vrai que je dis trop de bêtises...

Anonyme a dit…

SI TU SAIS PAS QUOI FAIRE

…illi partibus aequis
huc caput atque illuc umero ex utroque pependit.
Virgile, Enéide, livre IX, vers 754 – 755.


La hache fendit l’air, s’abattit avec un bruit franc sur le morceau de hêtre qui s’ouvrit en deux, et s’arrêta juste à toucher le billot. Il y plaça un autre rondin et recommença l’opération. Le fer coupait à merveille ; il faut dire qu’il était entretenu, usé à la meule, blanchi à la lime, affilé à la pierre. Il avait toujours pris le plus grand soin de ses outils.
— Si tu sais pas quoi faire, papa, sans te commander, va me refendre un peu de bois pour la cuisinière, elle lui avait dit, la Louise.
Si tu sais pas quoi faire ! Si tu sais pas quoi faire, prends un marteau et tape-toi sur les doigts ! Bien sûr qu’il ne savait pas quoi faire dans l’épicerie, au bourg. Le gendre parti avant l’aube avec le cheval et la carriole pour sa tournée de caïffa. Sa fille qui tenait la boutique dans laquelle, crainte qu’il ne renversât quelque chose, on ne lui permettait guère de poser les pieds. Il passait ses journées assis à la fenêtre, à regarder passer les gens, les chevaux, les vélos. Parfois une voiture. Avant, il traversait jusqu’au jardin, mais on lui avait interdit de franchir la nationale : depuis que les premières automobiles avaient fait leur apparition, il avait déjà failli se faire bousculer deux ou trois fois. Ces engins, c’était tout de suite sur vous ; on ne s’imaginait pas que ça pouvait arriver si vite. Alors, désormais, il ne faisait plus que contourner la maison et, par le sentier qui la longeait, descendait au hangar qui bordait l’enclos, derrière. Là, il s’occupait des poules, ou virounait longuement dans l’herbe en humant l’air, manière de deviner le temps, s’arrêtant parfois pour flatter de la main les rugosités d’un pommier.

L’après-midi tirait sur sa fin quand il avait déniché les louveteaux sur une pente de Puyloubeix, en davalant vers le Glanet. Ils s’ébattaient au bord de leur tanière, sortis là pour prendre le chaud et découvrir un monde neuf, tout éblouis de la lumière de mai. Sous un grand mélèze que la tempête de l’automne dernier avait couché, la mère avait mis bas entre le chevelu des racines, dans le trou qu’elles avaient laissé. Il s’était approché avec précaution, face au vent, avait enlevé sa veste et l’avait jetée comme un filet, et voilà qu’ils étaient pris tous les quatre. Trois petites femelles et un mâle de quinze jours tout au plus qui gigotaient et piaulaient maintenant dans le carnier de son habit de chasse. Il avait rapporté sa quête à la maison, s’était retourné machinal en franchissant le seuil. La louve était là qui l’avait suivi tout au long. Ses yeux vifs et dorés brasillaient à la lisière du bois, dans le coudert.

Tchac ! Et les deux parts retombaient chacune de son côté ; il les ramassait et les entassait auprès.
C’était surtout quand les gamins étaient là qu’il se réfugiait derrière, ses petits-enfants qui le taquinaient, le faisaient enrager et le saoulaient, courant en tous sens, lui braillant aux oreilles des mots de ce français qu’ils apprenaient à l’école et auxquels, la plupart du temps, il ne comprenait goutte. Là, abrité de l’agitation et des bruits de la route par la rangée des maisons qui leur faisait barrage, il était enfin tranquille, parmi les gloussements philosophes des poules. A croire qu’il n’y avait plus qu’elles pour parler patois dans ce monde. Sa fille lui avait expliqué que le maître avait bien averti de s’adresser aux enfants en français. Alors, le plus simple, bien sûr, c’était de tenir sa langue. Il s’était rencogné dans le silence.

La louve était restée là toute la nuit à attendre, en bordure de taillis. Il avait nourri les petits d’un peu de pain trempé dans du lait et de rognures de couenne, les avait enfermés dans une panière à couvercle en clisses de châtaignier où ils s’étaient endormis. C’est Louise qui avait été contente de trouver les petites boules de fourrure en rentrant de l’école, et de les caresser, et de se laisser mordiller les doigts, et que je te les tripote, le regard pétillant de bonheur. La maman, elle, n’était guère ravie.
— Tu vois bien que ça pue et que ça pisse partout ! Et qu’est-ce qu’il t’a pris de me ramener ça, mon pauvre homme ? Je te leur passerais un coup de tisonnier derrière les oreilles, moi, que ça serait vite fait, crois-moi.

Ah ! les femmes... Bientôt dix ans qu’elle était partie, sa vieille, le jour de la balade et du feu d’artifice.
Une fois le bois fendu, il en avait rangé les quartiers dans un cageot. Il avait pris la scie, l’avait retendue de trois tours, avait approché la chèvre et débité quelques bûches pour s’avancer une prochaine fois, respirant goulûment l'effluve familier du bois, odeurs de chêne rouvre et de fayard mêlées.

Au petit matin, par la fenêtre, il avait vu la louve à la lisière, les oreilles dressées, figée sous la bruine qui s’était mise à tomber au cours de la nuit.
Il avait découvert le feu et l’avait ranimé de trois coups de soufflet. Il était sorti pour ouvrir aux volailles, donner aux chats et détacher les deux vaches et le veau qu’il avait menés au pré des Sagnes. Il avait tiré le fumier. Il était rentré manger la soupe que la femme avait réchauffée. La petite était déjà prête qui câlinait les nourrissons. C’était bien la première fois qu’elle se levait si tôt pour aller en classe.
— Arrête un peu de les manier, Louise, que tu vas les faire crever ! Laisse-les tranquilles, voyons.
Mais tu parles, ça n’écoutait pas plus qu’une cabre. Et puis, c’était quand même pour elle qu’il les avait rapportés à la maison. Qu’elle les voie de près, qu’elle les touche, qu’elle les renifle : qu’elle puisse dire plus tard qu’elle avait tenu dans ses menottes de fillette ce qui était à coup sûr les derniers loups du canton.
— Allez, on y va, et mets ton capuchon, que ça rousine.
Sa grosse main rêche enserrant la sienne si frêle, il l’avait accompagnée jusqu’à l’embranchement de la route de Chantelauve. Leurs sabots battant le chemin de conserve, elle lui avait redit sa récitation :
« Les nuages couraient sur la lune enflammée
Comme sur l'incendie on voit fuir la fumée,
Et les bois étaient noirs jusques à l'horizon… »
Il avait regardé s’éloigner la silhouette menue en direction du village, entre les haillons de brume.
Quand il était revenu, la bête l’espérait, timide et confiante, à la même place.

Il détendit la scie et s’assit un moment sur le billot pour s’en rouler une ; d’une main, s’il vous plaît. Il décapuchonna le briquet, le battit ; une flamme puante s’éleva à laquelle il alluma le cylindre parfaitement tourné. Il en tira une longue bouffée, encore une que les Prussiens n’auront pas, la garda longtemps dans les poumons avant de la souffler vers la poule la plus proche, une aïeule qui le guignait d’un oeil rond et s’éloigna battant des ailes avec des cris d’indignation. Il aimait les poules et leur apparente placidité, il aimait les voir s’ébrouer et se doucher de poussière, il aimait les voir se précipiter quand il arrivait tablier retroussé, n’ignorant pas qu’il s’y cachait du grain. Il avait toujours pensé qu’elles étaient plus malignes qu’on ne le croyait. C’était toujours un crève-coeur quand il lui fallait en saigner une qui, trop avancée en âge, ne pondait plus. Aussi maintenant était-il soulagé que ce soit sa fille qui s’en charge. Ce n’était quand même pas métier d’homme.

Plantée dans les fougères sur ses pattes puissantes, les yeux obliques et jaunes fixés droit sur lui, la femelle impassible montait la garde. Il était rentré, avait empoché les quatre louvets dans le carnier de velours. Bâton en main, il s’était enfoncé dans les fourrés, éveillant au branle-bas des geais l'essor furieux d’une volée de corneilles. Il devinait derrière lui la présence animale, flairait son parfum fauve. Epié par la mère, il avait déposé les petits dans la résille des bruyères et l’entrelacs des souches, à l’aube de la louvière où ils s’étaient engouffrés en piaillant. Puis il avait fait demi-tour vers la ferme. Le travail l’attendait, ce n’était pas ce qui manquait.
Louise avait bien un peu pleurniché, le soir, de les savoir en allés. Il l’avait distraite d’un sucre d’orge et consolée par la promesse de l’emmener leur rendre visite demain, jeudi, parole. Sachant bien que la mère les aurait déménagés.
Ils n’en avaient retrouvé que des laissées.
Ils n’entreraient jamais dans le pacte des villes.

Lui non plus.
Prenant appui sur ses genoux il se releva en buffant, lâcha le mégot qu’il écrasa du pied, déposa soigneux son béret sur le tas de bois, se cracha dans les paumes et empoigna son hache. Il fit habilement rouler le manche dans ses mains pour amener le taillant face à lui, laissa un instant l’outil comme un balancier d’horloge aller et venir entre ses jambes écartées et, crispant soudain ses forces, avec un han ! frappa d’un coup sec.

Anonyme a dit…

Christian c'est ton chouchou : il dit JAMAIS de bêtises et il vient pas souvent.
Ton deuxième chouchou, c'est moi...

claude a dit…

Il est beau ce loup dans ce joli bois.Peut-on se promener dans ce bois si le loup y est ???

lyliane six a dit…

Bonne année Maxime, continuez de nous enchanter la vue par vos superbes photos.Ce loup n'est pas empaillé? il a de la chance ce magnifique animal de vivre encore en liberté, malgré sa terrible réputation de mangeur d'hommes!(qu'il n'est pas ).

Anonyme a dit…

Ca c'est sûr, ce loulà l'a pas de collier mais l'est pas comme moi lui. L'est réservé...

hpy a dit…

Un beau spécimen.
Et une belle photo.

Peter a dit…

Oui, une belle photo, bien sur!!! ... et pas de bergers malheureux dans le coin!

Anonyme a dit…

Les bergers allemands c'est des chiens-loups...

Anonyme a dit…

Les bergers limousins ils sont très chats-loups

Anonyme a dit…

Pfff mais y'a que des fous chez toi ... huhu ... ben ton potrrait de loup est genial, et ta presentation tout autant ... les pauvres betes on leur brime leurs intincts c'est po juste ... la vie est mal fichu !!!
Bisous
Adré

Bergson a dit…

je découvre ce blog et je dirais chapeau bas monsieur.

les catégorie délit de fuite er fausse symétrie me laisse éblouï
Bonne continuation et à bientôt

Anouschka a dit…

J'ai rencontré un loup, un jour. Je m'en rapelle et je me suis agenouillée.
Petite, souvent, avec mon père, on regardait le Miracle des loups...

Nathalie H.D. a dit…

Quelle magnifique photo et quelle somptueuse histoire apportée là par Christian ! Les deux conjuguées sont éblouissantes.
Merci à tous les deux.
Quant à P'tit Loup, oui elle a de la chance d'avoir un ami tel que toi, mais c'est parce qu'elle le vaut bien. Bise à tous

Anonyme a dit…

Well composed shot of a european forset legend.
Never seen one in the wild...
You lucky one!

Anonyme a dit…

T'as des nouvelles au fait du p'tit mignon à la boucle qui se vautrait dans ma salade ?
Dis, dis. T'as vu des traces de vie du chat-roux à la peau-ki-plisse depuis dimanche ? D'après toi un chat même vieux, c'est de la viande comment ? De la blanche ou de la rouge ?
Ca pèse combien de kilo ?

En tout cas, merci Ping de cette jolie photo qui fait comme une mise en scène de guignol, avec un fond et un devant et des mains qui manipulent la poupée et touça pou kon voit bien ko y lé bo et y fait peur le grand méchant loup. sauvage
Y me fait pas trop peur, y me fait peine, car je suis même pas sûre que ses analyses génétiques montrent que c'est un natif du coin.

Car tu vois ce magnifique loup, cé pas Ko le pan, c'est pas un regard concupiscent kila mais un peu les même zyeux que le tigre du cirque Roger Lanzac, non ?


MAIS ! Si pouvait s'échapper, l'aurait vite fait de retrouver ses instincts. Cé pouça j'ai un peu peur pour le chat-roux sil a trop taquiné le loup...

Chamamy a dit…

C'est vrai que le roux matou a disparu depuis que le loup hante ces lieux....
et il n'a pas l'air empaillé ce bel animal,sûr qu'il doit avoir une petite faim depuis dimanche!
Je ne vais pas m'attarder non plus!

Tietie007 a dit…

Le loup reste aujourd'hui la métaphore de l'agonie de la nature.
http://tietie007.over-blog.com

Maxime a dit…

Non, le petit félin roux n'a pas été mangé par le loup. Il vaquait simplement à d'autres occupations, au nombre desquelles la plus avouable a été le classement de ses clichés de l'an dernier (guère plus de quelques milliers).
Je pense que ce délai n'a toutefois pas été de trop pour apprécier le splendide texte de Christian, et en contrepoint les joyeuses gambades de P'Tit Loup.
Merci à tous de votre visite.

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